lundi 30 mars 2009

La classe des filles ( 21ème jour )

Noémie s’est littéralement jetée sur moi…

- Faut que tu me rendes un service… Faut absolument que tu me rendes un service…

- Si je peux… Mais qu’est-ce qui se passe ?… T’as une de ces têtes !…

- C’est Eric… Il se doute de quelque chose…Faudrait que tu lui dises – il va sûrement te demander – faudrait que tu lui dises qu’on était ensemble toutes les deux hier soir… Qu’on s’est pas quittées de la soirée… C’est important… Très…

- Et on était où ?… On faisait quoi ?

- Rien… On s’est promenées en ville… On a bu un coup… On a discuté… Et on a pas vu le temps passer…

- Et tu crois qu’il va gober ça ?

- J’ai pas le choix… J’ai pas d’autre explication… Du moins qui tienne la route… Et faut absolument que je réussisse à le garder Eric… A tout prix… Parce que jamais je retrouverai une occasion pareille… Jamais…

- Et t’étais où en fait ?

- Ben là-bas !…

- Où ça là-bas ?

- Oh, tu sais bien !… Fais pas l’idiote… Me dis pas que tu m’as pas vue l’autre fois…

- Ah, à l’infirmerie !?

- A l’infirmerie, oui… Ceux-là aussi faudrait les prévenir pour bien faire… Leur dire que j’y remettrai pas les pieds… Bon, mais enfin eux je m’en fiche un peu… Complètement… L’important c’est Eric… Et là je compte sur toi, hein ?… Tu mets le paquet…




Un pied posé sur la margelle, il était absorbé dans la contemplation de quelque chose tout au fond de la grande vasque à jet d’eau…

- Qu’est-ce que tu regardes ?

- Les poissons rouges… Et je me demandais ce qu’ils devenaient l’hiver quand il gèle…

- Ca, alors là, j’en sais rien du tout…

- Tu as quelque chose à me dire ?

- Non… Rien de spécial… Pourquoi ?

- Ca fait un quart d’heure que tu me tournes autour… C’est Noémie qui t’envoie, hein ?!…

- Pas du tout !… Pas du tout !… Pourquoi elle m’enverrait ?…

- Pour me jurer que t’étais avec elle hier soir alors qu’en réalité elle était en train de se faire tirer je sais pas trop où par je sais pas qui…

- Hein ?!… Mais jamais de la vie !… Avec le temps qu’il faisait on a voulu aller faire un tour et…

- Te fatigue pas !… Et puis tiens, je vais te mettre complètement à l’aise… Elle peut bien s’envoyer en l’air avec tout le pays si elle veut j’en ai strictement rien à foutre…

- T’en as rien à foutre d’elle tout court, quoi !

- C’est pas du tout ce que j’ai dit… Elle se croit très maligne Noémie… Elle est persuadée qu’elle mène le jeu à sa guise… Ce n’est peut-être pas aussi simple que ça… Elle ne me manipule peut-être pas aussi facilement qu’elle se l’imagine… Mais bon, ça c’est moi que ça regarde… En ce qui te concerne toi maintenant, concrètement, t’as deux solutions : ou bien tu lui dis que ses salades j’en crois pas un mot, que je suis absolument pas dupe et ça va être des histoires et des complications à n’en plus finir… Auxquelles tu vas forcément être mêlée… Et qui vont à l’évidence te retomber dessus… Ou bien tu lui laisses sagement croire que tu t’es acquittée avec succès de la mission qu’elle t’avait confiée et j’abonderai dans ton sens… Il n’y a guère, je crois, d’hésitation à avoir…




Je les ai présentés l’un à l’autre… « Adeline… Félicien… » Il lui a souri, lui a tendu la main. Elle ne l’a pas prise. Elle l’a toisé, glaciale…

- Alors comme ça c’est vous ?… C’est vous qui épiez dans les douches comme un gamin de huit ans ?

Asséné d’une voix forte. A la table voisine les conversations se sont tues. Filles et garçons ont levé les yeux sur lui avec curiosité. Il a tiré une chaise…

- Quelqu’un vous a dit de vous asseoir ?

- Non, non, mais…

- Eh bien alors laissez cette chaise tranquille… Et je vous ai posé une question, il me semble…

- C’est moi, oui !…

- Et vous n’avez rien de mieux à faire ?

Il n’a pas répondu. Il a baissé la tête…

- Ici on vous a pris sur le fait et appliqué la sanction méritée, mais ailleurs ?… Parce que je suppose qu’ailleurs vous vous adonnez au même genre d’activités… Sous cette forme ou sous une autre… En toute impunité… Est-ce que je me trompe ?

- Non…

- C’est ignoble… Ignoble de s’introduire dans la vie privée des gens comme ça… Chacun a droit à son intimité… A sa tranquillité… La loi n’est pas assez sévère avec les gens comme vous qui empoisonnent la vie des autres… Ce qu’il faudrait…




On m’a touché le bras. C’était Pernelle. Pernelle qui m’a fait signe de la suivre. Je me suis levée. Adeline ne s’est pas interrompue…

- Alors là, ma petite, là, cette fois…

Elle m’a saisie et traînée par l’oreille, aussitôt la porte franchie, à travers tout le parking…

- Ah, tu cherches !… Eh bien tu vas trouver…

Deux ou trois groupes de jeunes qui fumaient en discutant se sont esclaffés sur notre passage. Elle ne m’a lâchée qu’une fois de l’autre côté sur le petit chemin qui se faufile entre les jardins…

- Alors ça t’a pas suffi ?… Qu’est-ce que je t’avais dit ?… Je t’avais interdit de traficoter avec cette fille… Qu’est-ce que vous êtes encore allé manigancer ?

- Mais rien !… Rien du tout… C’est juste qu’elle voulait faire la connaissance de Félicien…

- Tu n’as pas à lui faire faire la connaissance de qui que ce soit sans m’en demander d’abord l’autorisation…

- Je croyais…

- Tu n’as pas à croire quoi que ce soit… On te l’a déjà dit… Et dès le premier jour… Tu as à appliquer le règlement… Un point c’est tout… Est-ce que c’est compris ?

- Oui…

- J’aimerais quand bien même savoir ce que tu cherches à te prouver en prenant comme ça systématiquement le contre-pied de ce qu’on te demande… As-tu si peu de personnalité qu’il te faille constamment te donner l’illusion, en en affichant haut et fort l’apparence, qu’elle existe bel et bien ?… En attendant que tu trouves une réponse à cette intéressante question, moi, je vais faire mon devoir… Allez !… Mets-toi en position…

- Ici ?… Là ?… Maintenant ?… Mais on peut nous voir !…

- Et alors ?… Estime-toi encore heureuse que ce ne soit pas là-bas, à l’intérieur, que je te punisse puisque c’est là-bas, devant tout le monde, que tu as désobéi…

jeudi 26 mars 2009

La classe des filles ( 20ème jour )

- Qu’est-ce que je t’avais dit, toi ?… Demandé ?…
- De venir sans rien à vos cours…
- Parfaitement !… Eh bien alors ?!… Tu feras en sorte dorénavant que je n’aie pas à me répéter…
Noëlle s’est levée sans un mot, est montée sur l’estrade, s’est déshabillée… La prof est restée un long moment, immobile, à la contempler en silence…
- C’est fabuleux… Absolument fabuleux… Tu es d’une beauté fabuleuse… On devrait t’obliger à rester nue en permanence... Partout… Toujours… Il y a des trésors qu’en aucun cas on ne devrait avoir le droit de soustraire au regard de qui que ce soit… C’est criminel… Véritablement criminel… Bon, mais que ça ne nous empêche pas d’aller voir aussi comment sont faites tes petites camarades… Et, tiens, tu sais pas ?… C’est toi qui vas choisir… Tu vas m’en trouver une qui paie pas de mine à première vue comme ça, mais qui en dessous cache de véritables trésors… Je te fais confiance… Vas-y !…



Son regard a couru de fille en fille, s’est arrêté sur moi, s’y est brièvement attardé. Est reparti. Revenu. S’est fait insistant. M’a interrogée…
- Elle te plaît celle-là ?
- Oh oui, oui !
Elle a aussitôt rougi…
- Oh non, non !… Pas elle…
- Qui alors ?
- Stéphanie…
- C’est qui Stéphanie ?… Toi ?… Eh bien viens là… Déshabille-toi !… Ou plutôt, non !… Attends !… C’est Noëlle qui va te déshabiller… Ce sera beaucoup plus amusant… Catherine de Médicis aussi se délectait de voir ses suivantes se dépouiller mutuellement de leurs vêtements… Allez !…
Et Nöelle l’a fait. Du bout des doigts. En gestes gauches et hésitants…
- Carrément !… Carrément !… Dépiaute-la !… Elle est pas en sucre, tu sais !… Là, c’est mieux… Le soutien-gorge maintenant !… Oui… Oui… Mais c’est qu’ils sont mignons comme tout ces petits nénés… Minuscules, mais tellement attendrissants… Tu as bon goût… Tu as très bon goût…
Elle les a recouverts de ses mains, fait disparaître…
- Ils sont doux et chauds comme des oisillons tombés du nid… Tiens, touche, toi aussi !… Touche !
Noëlle a avancé la main, l’a précipitamment ramenée en arrière, à nouveau avancée, s’est arrêtée…
- Mais si !… Touche, n’aie pas peur !
Elle s’en est emparée, d’autorité, la lui a posée dessus. Noëlle ne s’est pas dérobée, l’y a laissée…
- Tu sais que Catherine adorait les voir se mignoter entre elles ?… Surtout quand elles n’y étaient pas spontanément portées… Elle aimait leurs réticences… Leur dégoût parfois… Et le plaisir très vif qu’elles finissaient le plus souvent manifestement par y prendre quand elle les avait obligées à le surmonter…
Elle lui a pesé sur la nuque…
- Vas-y !… Va !… Avec tes lèvres… Je veux…
Stéphanie a ondulé. Doucement gémi… Lui a rendu ses caresses… Noëlle a glissé la main dans sa culotte. Elles se sont enlacées…



A midi elle n’était pas au réfectoire…
Elle pleurait à chaudes larmes, affalée sur son lit…
- Va-t-en !… Laisse-moi !… Je veux voir personne… Elle a tout gâché l’autre salope… Tout…
- Mais non !… C’est pas si grave !
- Si, c’est grave, si !… Déjà que tu t’étais complètement détachée de moi !… Mais je me disais que j’avais quand même peut-être encore une toute petite chance… En te pesant pas trop… En me faisant toute légère… C’est foutu… Après ce qui s’est passé là c’est foutu… Non, mais comment j’ai pu faire ça !… Devant tout le monde !… Et en prenant mon pied en plus… Et pas qu’un peu !… Qu’est-ce qu’elles doivent penser les filles !… Pour qui je dois passer maintenant… Je vais plus jamais oser regarder personne en face… J’ai plus qu’à faire mon sac et à disparaître… J’ai bien trop honte…
- Il y a vraiment pas de quoi…
- Tu sais ce que j’aurais dû faire ?… C’est te choisir, toi, tout à l’heure en classe… Au moins j’aurais eu une dernière fois du bonheur avec toi avant de sortir de ta vie pour toujours… J’ai pas osé… J’ai pas voulu… Pourtant il y avait que de toi que j’avais envie… Il y a que de toi que j’ai envie… C’est vrai, tu sais !… Mais pas devant elles… Notre histoire à nous elle est seulement à nous et à personne d’autre… Tu me crois ?
- Bien sûr que je te crois !… Mais à quoi ça t’avance de te mettre dans des états pareils… Allez, calme-toi !… Calme-toi !…
- Tu veux pas me prendre dans tes bras ?… Juste un peu… Un tout petit peu… Merci… Oh, merci… Je suis si bien là… Je te demande rien, tu sais… Je veux pas que tu penses que je te demande quelque chose… Que tu te sentes obligée à quoi que ce soit avec moi… Je n’attends rien… Je ne veux rien… Juste ce que tu veux, toi…
Elle s’est tue. Je l’ai embrassée. On est restées serrées l’une contre l’autre. Elle m’a caressé le cou. La nuque…
- Tu m’en veux pas trop ?
- Je t’en veux pas du tout… Au contraire…
- Au contraire ?… Comment ça au contraire ?
- J’ai aimé te voir jouir… Sans retenue… Comme une petite folle… Devant tout le monde…
- Oui, mais non… C’est parce que…
- C’est parce que ça te met dans tous tes états qu’on te trouve belle… Qu’on t’admire… C’est parce que sentir que tu excitais la prof t’excitait… C’est pas vrai peut-être ?
- Si !… Tu comprends trop de choses… Tu comprends tout…
- J’aime qu’on te désire… Tu es très exactement faite pour ça… Pour que le désir se pose sur toi, s’affole de toi…
- Il n’y a que toi qui compte… Que toi qui as de l’importance… J’irai avec qui tu voudras… Devant qui tu voudras… Chaque fois que tu voudras…
J’ai pris sa tête entre mes mains. Je l’ai attirée entre mes cuisses…



Basile faisait la vaisselle. Une vaisselle monumentale. Et tout seul…
- Il est où Fournier ?…
- Je sais pas… Je l’ai pas vu…
- Dis-moi… Tu le connais bien Félicien ?
- Un peu que je le connais… On est dans le même box…
- Alors ça t’ennuierait de lui faire une commission ?… De lui dire qu’il vienne en boîte demain soir sans faute… T’oublieras pas ?…
- J’oublierai pas, non… Mais c’est indiscret de te demander ce qui se trame ?
- C’est Adeline… Elle a entendu raconter comment il avait ramassé l’autre jour… Elle veut absolument le connaître…
- Il sera ravi… Les femmes de caractère le fascinent… Et avec Adeline il va être servi…
- Et toi ?
- Quoi, moi ?
- Tu aimes quoi ?… Tu as envie de quoi ? Tu cherches quoi ?… Ca fait trois semaines qu’on travaille ensemble ici tous les après-midi et je sais rien de toi… Absolument rien…
- C’est peut-être qu’il y a pas grand chose à savoir…
- T’es pas venu ici pour rien quand même !… Il y avait bien une raison…
- Tu veux vraiment savoir ?…
- Evidemment puisque je te le demande…
- Si je suis ici c’est pour le seul et unique plaisir de te voir recevoir la fessée… Et je dois reconnaître que, jusqu’à présent, j’ai été tout particulièrement gâté…
- Idiot !… Quel idiot tu fais…
- Pas tant que ça… Pas tant que ça…

lundi 23 mars 2009

La classe des filles ( 19ème jour )

Des chuchotements dans la nuit. La lueur tamisée d’une lampe de poche. Des rires. Un regroupement autour du lit de Martial…

- Elle dort… De toute façon elle dort…

- Non… Je vais pas rester… Ca craint… Non… Laissez-moi !

- C’est ta copine ou c’est pas ta copine ?

- Ben si, mais…

- De quoi t’as peur ?… Qu’elle aille nous dénoncer ?

- Non… Ca non… Mais ça me gêne de la savoir là…

- Tu parles !… Qu’est-ce t’en as à foutre ?… Elle sait bien ce que c’est quand même à son âge, non ?…

- Et puis elle dort, on t’dit…

- Et si elle se réveille ?

- On la fera participer…

- Ou on l’assommera…

Il y en a un qui a ri. Tout s’est tu. Un souffle plus court. Encore des chuchotements. Le lit qui grince. Un souffle éperdu. Un gémissement. D’autres. Un cri étouffé. Un autre. Une psalmodie de plaisir. Eperdue. Ca s’est apaisé. Ca a repris. Ca s’est envolé. Des bruits de baiser…

- Faut que j’y aille… Si, faut que j’y aille… Si jamais on s’aperçoit que j’y suis pas là-bas…




- Comment ça va ce matin ?… Bien dormi ?

Elle est passée de lit en lit, a pris la tension, la température dans l’oreille…

- Vous vous portez comme des charmes… Demain je vous vire… Tous… Alors profitez bien de votre journée…

Elle s’est retournée sur le pas de la porte avant de disparaître…

- Et n’oubliez pas la douche…




- C’est moi qui l’emmène… Tu y es allé hier…

Fermement. Par le bras. Il ne m’a lâchée que sous la douche…

- Tu t’es branlée cette nuit…

Sur le ton de la simple et tranquille constatation…

- Hein ?!… Mais ça va pas !… Jamais de la vie… T’es pas bien !…

- Si !… Tu t’es branlée… Je t’ai entendue… Oh, mais il y a pas de honte, hein !… Faut dire qu’il y avait de quoi… Elle en était Noémie… Trois types pour elle toute seule c’est la fête… Elle aurait tort de pas en profiter…

Il a marqué un long temps d’arrêt…

- Ca te tenterait pas, toi ?

- Oui, ben alors là sûrement pas !… Il y a pas de risques !…

- C’est bien vrai ce mensonge ?… Personne te connaît ici… Personne le saurait… Même pas Noémie… Il y a des occasions qui se laissent pas passer, tu sais ! Parce qu’elles ne se représentent jamais… Et qu’il ne nous reste, plus tard, que le regret de ne pas les avoir saisies et d’avoir laissé les préjugés décider à notre place…

- Mais non, c’est pas ça, non, mais…

Il s’est emparé, d’autorité, de mon gant de toilette…

- Donne !… Tu fais pitié, là, à te contorsionner dans tous les sens pour essayer, sans succès, de te laver le dos…

Il a vigoureusement frotté. Les omoplates. Entre les omoplates. Plus bas. Les reins. Plus bas encore. J’étais incapable de dire quoi que ce soit. De faire quoi que ce soit. Incapable d’empêcher quoi que ce soit. Au contraire : j’ai imperceptiblement écarté les fesses pour qu’il puisse s’insinuer entre elles. Dans mon cou il y a eu son souffle. Tout près. Ses mains sur mes seins. Qui en ont fait rouler les pointes. Son désir d’homme plaqué contre moi…

- Viens !… Viens !… On va rejoindre les autres…

Je n’ai pas protesté. Je n’ai pas résisté. Il m’a soulevée à bras le corps. Emportée. J’ai fermé les yeux…




Il m’a ramenée sur mon lit. Il y a eu ses mains. D’autres mains. Il y a eu sa bouche. Une autre. Encore une autre. Leurs doigts. Leurs lèvres. Qui ont couru sur moi. Qui m’ont parcourue. Apprise. Habitée. Je me suis abandonnée à eux. A leur désir de moi. Il y en a un qui s’est fait impatient. J’ai rouvert les yeux sur lui. Il voulait. Il me voulait. Tant. J’ai refermé les jambes sur lui. J’ai emprisonné son plaisir. Et j’ai définitivement perdu toute notion de tout. Il y a eu lui. Un autre. Les deux autres. Encore lui. Il y a eu mes cris. A pleine gorge. Mes feulements. Mes ruades. Houle. Ressac. Vagues. Tempête…




Ils m’ont déposée sur la rive. S’y sont échoués avec moi.Satisfaits. Repus…

- Tu n’as pas honte ?

- Hein ?… Honte ?!… Honte de quoi ?…

- Et elle demande de quoi !… Non, mais tu te fiches de nous ?!… Est-ce que tu te rends seulement compte de ce que tu as fait ?

- Vu son air ahuri ça m’étonnerait…

- Bon, alors on te résume… Tu débarques ici hier avec une flemmingite aigüe… T’y trouves trois mecs installés… Au lieu de repartir aussitôt, comme aurait fait n’importe quelle fille à ta place, tu t’incrustes, ravie de l’aubaine…

- Mais non, mais…

- Laisse-nous finir !… L’infirmière vient t’examiner… Normal… Tu aurais pu lui demander d’aller faire ça dans la petite pièce à côté… Elle aurait pas refusé… Mais non, penses-tu !… T’étais bien trop contente de pouvoir tout nous déballer sous le nez…

- Mais c’est pas vrai !…

- Après ça Lionel veut gentiment te montrer où se trouve la douche… Tu trouves rien de mieux que de l’enfermer là-dedans avec toi…

- Mais c’est lui !… C’est lui !… C’est obligatoire, il a dit…

- N’importe quoi !… Vraiment n’importe quoi…

- Et quand bien même il l’aurait dit !… Tu l’aurais cru ?… Personne croirait une chose pareille… Même la dernière des dindes…

- Quant à ce qui vient de se passer là, maintenant, tu admettras avec nous que tu t’es comportée de façon parfaitement inqualifiable… Une femme qui se respecte vraiment ne s’offre pas, comme ça, au premier venu…

- Surtout quand ils sont trois…

- Et de façon aussi délibérément impudique…

- Non… Tu sais ce que tu mériterais ?… C’est une bonne correction… Tu l’aurais vraiment pas volée…

Sans un mot je me suis retournée sur le ventre…

- En plus !… Alors là !… Ah oui que tu la mérites !… Ah oui !…

Une main s’est posée sur mes fesses. Une autre… Elles se sont élancées…

jeudi 19 mars 2009

La classe des filles ( 18ème jour )

- Tu te lèves pas ?

C’était Trianne, penchée sur moi…

- Hein ?… Tu te lèves pas ?… Tu vas être en retard…

- Je suis crevée… J’ai pas fermé l’œil de la nuit…

- Va à l’infirmerie… Tu pourras dormir… Tu veux qu’on t’emmène ?

Elle n’ont pas attendu ma réponse. On m’a soulevée, entraînée, tirée, portée, fait monter, redescendre pour finalement me déposer, dans l’obscurité, sur un lit aux draps délicieusement frais. Je m’y suis aussitôt rendormie…




C’est la voix sèche de l’infirmière, une femme d’âge canonique, qui m’a – définitivement cette fois – extirpée du sommeil…

- Qu’est-ce qu’elle fait là, celle-là ?… D’où elle sort ?

Elle était en train de tirer les rideaux. La lumière m’a éblouie. Fait cligner des yeux. Il y avait trois autres lits dans la pièce, tous les trois occupés. Par des types. Qui se sont étirés. Qui ont baîllé. Qui ont murmuré un vague « Salut ! »… C’était les trois garçons – ils ont une trentaine d’années – qui se tiennent toujours à l’écart des autres dans la cour et qui n’adressent pratiquement la parole à personne… « On dirait qu’ils sont là par erreur » disaient les filles, intriguées, au début. Avant de se désintéresser complètement d’eux…

- Encore une qui veut tirer au flanc, c’est ça ?… Je vais t’en faire passer l’envie, moi, ma petite, tu vas voir !… T’as mal où ?

- Nulle part… Mais je me sens vraiment pas bien… Epuisée… Vidée… J’ai plus de ressort…

- Oui… Eh bien faut commencer par te secouer… C’est pas en t’apitoyant à longueur de journée sur ton sort que ça va arranger les choses…

Elle m’a posé la main sur le front, l’y a laissée quelques secondes…

- En tout cas t’as pas de fièvre…

Elle a tiré draps et couvertures jusqu’au pied du lit…

- Retire-moi ça !…

Ca, c’était ma chemise de nuit…

- Eh bien ?!… Tu attends quoi ?… Le déluge ?… Oh la la !… Ma pauvre petite !… Ils vont pas en perdre la vue… Et c’est sûrement pas la première fois que… Allez, dépêche-toi !… Ne fais pas l’enfant… Là… C’est bien… Tu vois que tu peux être une grande fille raisonnable quand tu veux…

Elle m’a palpé le ventre longuement, consciencieusement, sur toute la surface…

- Il y a rien… Absolument rien !… Assieds-toi !… Tu as quel âge ?

- 42…

- Ils tiennent bien encore !… Des vrais seins de jeune fille… Allonge-toi maintenant !… Mets-toi sur le ventre… T’en as pris une belle, dis donc !… Et au martinet !… Il y a pas longtemps… Faut croire que tu fais partie de ces quelques fortes têtes qui ne savent pas quoi inventer pour se faire remarquer ici…

Elle m’a tapotée, de la phalange, tout au long du dos…

- Il y a rien… Absolument rien… Je vais quand même te garder un jour ou deux en observation. Par précaution. Mais arrête de t’écouter avec complaisance: tu te sentiras beaucoup mieux, tu verras… En attendant tu vas aller prendre une douche… Ca te dégourdira… Lionel va t’accompagner…




- Viens, c’est par là !…

Un couloir. Un coude. Encore un morceau de couloir. Il a ouvert une porte, m’a laissé passer, est entré derrière moi, a refermé…

- Oui, ben c’est bon maintenant !… Merci… Je vais me débrouiller toute seule…

- J’ai pas le droit… Faut que je reste… C’est le réglement… A l’infirmerie on laisse jamais personne tout seul sous la douche… A cause que si il y aurait un malaise faut pouvoir intervenir tout de suite… De toute façon ça fait un quart d’heure que je te vois à poil… Alors un peu plus un peu moins…

Il s’est tranquillement adossé à la porte…

- C’est vrai – elle a raison – t’en as pris une bonne… Qu’est-ce que t’avais fait ?… Oh, t’es pas obligée de répondre si tu veux pas, hein !… Moi, ce que j’en dis c’est surtout histoire de causer pendant que tu te laves… Parce que j’en ai strictement rien à foutre… C’est drôle cette manie qu’ils ont les gens de faire semblant de s’intéresser à ce qui leur arrive aux autres. En réalité chacun s’intéresse qu’à soi… T’es pas de mon avis ?… Ben dis donc t’es pas très bavarde, toi !… T’es toujours comme ça ou c’est juste avec moi ?

Il s’est tu quelques instants…

- J’aime bien ta chatte… Si, c’est vrai… J’aime bien quand elles se ferment complètement comme ça, que t’as juste la fente… Parce que quand ça déborde de partout, que t’as l’impression que ça dégouline, moi, c’est pas mon truc… Mais chacun ses goûts, hein !… Ah, ça y est ?!… T’as fini ?…




Il m’a ramenée…

- Bon, ben à mon tour maintenant !… Faut qu’il y en ait un qui m’accompagne, les gars… Tu viens, Martial ?

Le troisième s’est assis précautionneusement sur le bord de mon lit…

- Qui c’est qui t’a dit de venir ici, à l’infirmerie ?

- Les filles dans le box, ce matin !… Pourquoi ?

- Non… Comme ça… Et Noémie, elle est aussi dans ton box ?

- Non… Dans celui d’en face…

- Tu la connais bien ?

- Assez, oui !… Mais c’est quoi toutes ces questions ?

- C’est rien… C’est juste pour savoir…




Noëlle est passée en tout début d’après-midi…

- Je te dérange pas ?… Je veux pas te déranger…

- Mais bien sûr que non…

- Tu es malade ?… C’est pas grave au moins ?… Tu me le dirais, hein ?

- Mais non, c’est rien du tout… Un peu de fatigue… J’ai perdu l’habitude de me lever si tôt…

Elle m’a pris timidement la main. Je la lui ai laissée. Elle l’a serrée. Ses yeux se sont embrumés de bonheur. Elle a été sur le point de dire quelque chose, s’est retenue… Est brusquement devenue volubile…

- T’as pas perdu grand chose, tu sais… En Maths ça a été comme les autres fois… Sans aucun intérêt… Il y a quelque chose qu’il a pas compris… Ou alors c’est nous… Pour le reste le train-train… Il s’est rien passé… Rien qui vaille la peine… On s’emmerderait presque il y a des jours…

Elle a baissé la voix… Regardé ailleurs…

- De toute façon, moi, quand t’es pas là il y a plus rien qui m’intéresse…

Je me suis levée…

- On va faire un tour dans le couloir ?… Ca me dégourdira les jambes…

Quelques pas. Je l’ai attirée contre moi. J’ai posé mes lèvres sur les siennes. Elle m’a enveloppée de ses bras. On s’est longuement embrassées…

- Merci… Oh, merci…

Et elle s’est enfuie…

lundi 16 mars 2009

La classe des filles ( 17ème jour )

La Mac Miche a traversé toute la cour en poussant Félicien devant elle…

- Bon, alors tu avances, toi, oui ?… Dépêche-toi !…

Elle l’a fait mettre en rang avec nous. Les filles ont ri sous cape…

- Qu’est-ce qu’il fout là, lui ?

En classe, là-haut, elle l’a gardé sur l’estrade, à côté d’elle, tête baissée, près du bureau…

- Bien… Alors savez-vous à quel genre d’occupation se livre quotidiennement ce garçon ?

Cynthia m’a poussée du coude…

- Moi, j’ai bien une idée, mais…

- Non ?… Alors il va vous le dire lui-même… On t’écoute, toi !… Qu’est-ce que tu fais ?…

- Je les regarde…

- Tu les regardes, oui !… Et où ça ?…

- Dans les douches…

Il y a eu un long murmure réprobateur…

- Dans les douches, en effet !… En effet ce petit vicieux vous épie tous les jours depuis le grenier qui les jouxte… Bon… Alors maintenant tu te déshabilles… Eh bien ?!… Qu’est-ce que tu attends ?… Ah, on fait moins le fier, hein ?!… Allez !… Et on se dépêche…

Il s’est exécuté lentement, un vêtement après l’autre, soigneusement replié et déposé sur la chaise. Quand il a retiré son slip Jezabel et Roxane, derrière, ont éclaté de rire… Il a pudiquement croisé les mains sur son bas-ventre…

- Sur la tête !… Tes mains… Mets-les sur la tête…

Il a hésité, s’y est repris à deux fois pour obéir…

- Il va se passer quoi maintenant ?… A ton avis ?

- Je sais pas…

- Tu admettras avec moi que tu as mérité une sanction suffisamment sévère pour qu’elle te guérisse définitivement de ces mauvaises habitudes… Non ?… Tu crois pas ?…

- Si !…

- Ah, tu vois… Laquelle ?

- Je sais pas…

- Non ?… Vraiment ?… Il va falloir décider à ta place alors… Ce sont les filles qui vont s’en charger… Je te laisse avec elles… Tu verras, elles ne manquent pas d’idées…

Et elle a quitté la classe…




On s’est regardées les unes les autres et puis lui qui se dandinait sur l’estrade. Et encore nous. Ca a fusé d’un coup de derrière…

- C’est vraiment dégueulasse ce qu’il a fait !…

- Oui… Un sacré petit salopard… Il en a la gueule en plus !

Il y en a quatre ou cinq qui se sont levées. Qui sont allées l’entourer…

- Qu’est-ce qu’on lui fait ?

- Ce qu’il mériterait c’est qu’on les lui coupe, tiens !… Ca lui ferait passer l’envie de venir jeter un œil sur ce qui le regarde pas…

D’autres les ont rejointes… D’autres encore…

- Attendez !… Attendez !…

Pernelle s’est approchée et lui a bandé les yeux avec une grande écharpe de flanelle rose. A bien serré…

- Là… Ce sera quand même mieux comme ça, non ?… On se sentira plus à l’aise…

- Mais pas lui…

- On s’en fout de lui…

Roxane les lui a empoignées à pleine main…

- Chiche que je les lui décroche…

- Ce serait pas une grosse perte…

- Et si on lui en mettait une bonne plutôt pour commencer ?

- Oh oui !… Oui !… Ca oui !…

Elles l’ont retourné, nez contre le tableau, et elles se sont acharnées sur son derrière. A cinq. A six. A sept. Ensemble. Les unes après les autres. A toi. A moi. Encore ensemble. De bon cœur. Avec enthousiasme. Avec allégresse. Lui, il se trémoussait. Il dérivait tout au long de l’estrade en dansant d’un pied sur l’autre. Il a fini par crier…

- Oh, mais c’est qu’il sait chanter !…

- Et bien en plus !…

- Oui, il a une voix magnifique…

Elles ont repris de plus belle…

- Surtout quand elle grimpe comme ça dans les hauteurs… On ne s’en lasse pas… Des heures on l’écouterait… Des heures…




Il a bien fallu pourtant qu’elles finissent par s’arrêter. Rouges. Essoufflées. Les yeux brillants d’excitation. Elles l’ont fait pivoter, remis dans l’autre sens et elles ont éclaté de rire…

- Ca lui a bien plu, on dirait, à ce grand dégoûtant… Non, mais regardez-moi ça comment il bande !…

- Oui, elle veut faire sa fière… Et pas qu’un peu… T’as fini, oui ?… Est-ce que t’as fini ?

Une petite chiquenaude dessus. Une autre. Encore une autre. Tout un tas de chiquenaudes. Sans obtenir le moins du monde l’effet escompté. Au contraire : elle a semblé se dresser davantage. Elle a battu en l’air comme si elle voulait saluer et elle a explosé. Les filles se sont précipitamment reculées dans un grand éclat de rire. Ca s’est répandu un peu partout sur l’estrade. Tout le monde a applaudi…




En bas, aux cuisines, Adeline était toute seule…

- Il sont aux approvisionnements comme l’autre fois… On va se la couler douce… Mais d’abord tu vas me raconter…

- Te raconter ?… Te raconter quoi ?

- Ben ce matin… Le type… Vous vous y êtes toutes mises pour lui en coller une à ce qu’il paraît …

- Pas toutes… Six ou sept…

- T’étais dedans ?

- Non…

- Oui, ça, évidemment… J’aurais dû m’en douter… Eh bien raconte, quoi !…

Elle m’a écoutée sans m’interrompre avec une attention intense…

- Et c’est tout ?

- Ben oui !…

- Comment j’aimerais ça voir un type en recevoir une, moi, un jour !… Mais alors une vraie… Une carabinée…

- Inscris-toi pour l’année prochaine…

- Ah ben non, non!… Parce qu’il faut en prendre aussi et alors là, moi, c’est complètement exclu…

- Il y a Basile… Ca va bien finir par lui arriver…

- Ca, c’est pas sûr !… Depuis le temps qu’il nous amuse Fournier… Il lui fera jamais… Il a un truc qui bloque grave là-dessus avec les mecs… Non… Et puis Basile de toute façon… Tu l’as bien regardé ? Je veux pas être méchante, mais c’est tout sauf un homme Basile… Alors ça pourrait être rigolo, oui, comme ça, en passant… Sans plus… Tandis qu’un vrai mec, beau, viril, avec du style, de la classe, une personnalité, tout, quoi !… qui s’en prend une… Alors là… Là… Il était comment celui de ce matin ?

- Félicien ?… T’hallucinerais !…

- C’est vrai ?… Comment elle est mal faite la vie…

- Tu veux que je te le fasse connaître ?

- Tu pourrais ?… Quand ?… Comment ?…

- Samedi en boîte… Je te l’amène si tu veux… Et je te le présente…

- Si tu fais ça… Alors là si tu fais ça…

jeudi 12 mars 2009

La classe des filles ( 16ème jour )

- Entrez !…

Le cours de Français venait tout juste de commencer. On avait à peine eu le temps de déballer nos affaires… C’était Tixier… Qui s’est avancé vers le prof, lui a chuchoté quelque chose à l’oreille…

- Pernelle et Raphaëlle chez monsieur le Directeur…




Il trônait derrière un immense bureau. Il écrivait et nous a, pendant près d’un quart d’heure, laissées debout devant lui sans nous accorder la moindre attention…

- Bien… Alors… Ces demoiselles… De quoi s’agit-il ?

Pernelle lui a exposé, en quelques mots, la situation…

- Et comment s’appelle ce garçon ?

Il l’a noté sur un post-it qu’il a glissé dans un dossier avant de se tourner vers moi…

- Vous êtes fière de vous ?

Je me suis troublée… J’ai rougi… J’ai balbutié…

- Oui… Non… C’est-à-dire… C’est parce que… J’ai pensé…

Il m’a laissé silencieusement m’enfoncer sans me quitter des yeux…

- Ca s’appelle comment ce que vous êtes en train de faire ?… Eh bien ?!… Répondez !…

J’ai baissé la tête…

- Moucharder…

- Oui… Vous êtes en train de dénoncer lâchement l’un de vos petits camarades… Et c’est inacceptable… Intolérable… Vous allez être punie pour ça… Déshabillez-vous !…

Il a enfoncé l’un des boutons de la façade de son téléphone…

- Ménisson !… Vous pouvez venir, s’il vous plaît ?

- J’arrive, monsieur le Directeur…

J’ai retiré ma jupe et ma culotte. Je me suis arrêtée…

- Tout !… Entièrement… Le haut aussi…




En m’apercevant Monsieur Ménisson a levé les yeux au ciel, soupiré…

- Encore toi !… Dès le début il a fallu que tu te fasses remarquer… Dès le tout premier jour… Et ça continue…

- Vous vous en occupez, Ménisson ?

- Oh oui, que je vais m’en occuper, oui !…

Il m’a fait mettre à genoux face au directeur qui a légèrement reculé son fauteuil. Il m’a passé la main sur les fesses…

- A l’évidence il y a eu des précédents récents… Et appuyés… Il faut croire que nombre de tes professeurs et de tes surveillants ont eu à se plaindre de toi…

Ca a brusquement cinglé. Un coup sec. Par derrière. Sous l’effet de la surprise j’ai crié. Le directeur a souri. Tout le temps que ça a duré – une quinzaine de coups de martinet sèchement appliqués – il ne m’a pas quittée des yeux et je me suis mordu les lèvres jusqu’au sang pour ne pas recommencer. J’ai réussi. Sauf à la fin. Les trois derniers coups. Il a encore souri, l’air satisfait. C’est lui qui m’a fait signe de me relever…

- Tu peux te reculotter…

Il nous a congédiées toutes les deux du revers de la main…

- Ah oui !… Encore un mot…

Juste comme on allait sortir…

- Il va de soi que ce jeune homme que vous avez dénoncé se verra infliger le châtiment approprié… Vous pouvez disposer…




Dans le couloir, la porte du bureau à peine refermée, Pernelle a exigé…

- Fais voir !… Je veux voir…

Elle ne m’a pas laissé le temps. Elle a d’elle-même soulevé, fourragé, tiré. Avec impatience. Les yeux brillants elle a dévoilé. Elle s’est approprié. Elle a parcouru du bout des doigts… A voulu se faire plus intrusive…

- Laisse !… Laisse, j’ai dit !… Laisse-moi faire !… C’est moi qui décide… Je veux… Je veux savoir si tu mouilles…

Elle a poussé un petit grognement de triomphe…

- J’en étais sûre… Sûre… S’il y a quelqu’un que je perce complètement à jour c’est bien toi… Bon, mais on verra ça toutes les deux… Il faudra qu’on voie ça… J’ai une foule de projets en ce qui te concerne…




Dans la cour on nous a aussitôt entourées…

- Qu’est-ce qu’il vous voulait ?… Ben racontez, quoi !…

Pernelle a pris un air lointain et mystérieux…

- Pour le moment c’est top secret… Mais vous allez sûrement pas tarder à savoir…

- Oui, ben en attendant vous avez loupé quelque chose, les filles, en Français !…

- Qu’est-ce qui s’est passé ?…

- Elle s’en est pris une Laetitia… Et carabinée…

Pernelle a laissé éclater sa joie…

- Laetitia !… C’est pas vrai !… Elle est cuite !… Cette fois elle est cuite… Qu’est-ce qu’elle avait fait ?

- Personne en sait rien… C’est Tixier qui lui a mise… En plein cours… Il avait l’air furieux… Et il l’a embarquée… Il y en a qui disent qu’elle est virée…

- Ce serait trop beau pour être vrai…




Le chef-cuistot ne se lassait pas, l’œil allumé, de les écouter raconter toutes les deux ce qu’il s’obstinait à appeler mon « exhibition » sur le parking de la boîte samedi soir… Et elles, elles ne se lassaient pas d’en refaire encore et encore le récit… En l’agrémentant chaque fois de quelque détail supplémentaire oublié…

- En tout cas ça a pas fini de faire causer… Surtout les filles… Il y en a deux ou trois qui en sont pas encore revenues…

- Et qui sont pas près d’en revenir…

- Mais alors le jour où on va leur dire qu’on a vu Basile y passer !… Ce sera quand, M’sieur ?… Vous avez promis…

- Bientôt…

- Vous dites toujours ça… Et puis le temps passe, le temps passe et on voit jamais rien venir… C’est à la fin de la semaine prochaine qu’ils repartent… Vous voulez pas lui faire en réalité, hein !… Pourquoi vous voulez pas lui faire ?… Parce que vous voulez pas qu’on voie sa queue, c’est ça ?

- Jamais de la vie… Qu’est-ce que vous allez chercher ?

- Vous savez ce qu’elle dit notre copine Clotilde ?… Elle dit que vous lui ferez jamais… Parce que dans votre tête un mec ça doit pas la recevoir la fessée… Et que s’il la recevait devant nous Basile ce serait un peu comme si c’était vous qui la receviez… Et que ça c’est insupportable pour vous…

- C’est vraiment du grand n’importe quoi…

- C’est vrai ?… Vous allez lui faire alors ?

- Je me tue à vous le répéter…

- Quand ?

- Quand vous arrêterez de me poser la question…

lundi 9 mars 2009

La classe des filles ( 15ème jour )

A la sortie du réfectoire, après le petit déjeuner, Pernelle m’a renvoyée au dortoir…

- J’ai à te parler… Va m’attendre là-haut…

Où elle m’a fait poireauter une bonne demi-heure avant de finir par monter me rejoindre…

- C’est qui ta chef de box ?…

- Ben c’est toi !…

- C’est moi, oui !… Et il n’y a que moi – et mes supérieurs hiérarchiques – qui soient habilités à te donner des ordres… A plus forte raison quand tu es sous ma responsabilité directe à l’extérieur… Alors de quel droit t’es-tu permis hier soir d’en passer, à ce qu’on m’a affirmé, par où l’avaient décidé ces filles de cuisine ?

- C’est que le chef-cuistot…

- Monsieur Fournier a parfaitement le droit de t’administrer des fessées quand tu l’as mérité, mais il n’a pas la moindre compétence pour exiger de toi quoi que ce soit d’autre… Est-ce que c’est clair ?

- Oui…

- Je devrais normalement faire un rapport en haut lieu, qui déboucherait, sans le moindre doute possible, sur une exclusion définitive : ce qui se passe ici, entre les quatre murs de l’établissement, n’a absolument pas à transpirer à l’extérieur… Je devrais… Mais je n’ai pas du tout envie de te voir flanquer dehors : d’abord parce que tu peux m’être utile par rapport à Laetitia et ensuite parce que j’ai des projets te concernant… Si, si !… Alors on va régler gentiment ça toutes les deux en interne sans y mêler qui que ce soit… Mets-toi à genoux… Là… Comme ça… Oui… Et demande-moi pardon…

- Pardon, Pernelle… Je le ferai plus…

- Recommence !… C’est la culotte baissée que ça se demande pardon…

Je l’ai baissée…

- Pardon, Pernelle, s’il te plaît, pardon… Je recommencerai pas…

- Parfait… Ne bouge pas… Reste comme ça… C’est – sans contestation possible – la position dans laquelle tu te ressembles le plus… De tout près… De si près…




Noémie a absolument tenu à ce que, en tout début d’après-midi, j’attende Eric sur un banc, dans le parc, avec elle…

- Vu sous un certain angle je fais une connerie, je te l’accorde… Et encore… C’est pas si sûr… Parce que le meilleur moyen d’être heureuse c’est peut-être bien de te coller avec un mec dont t’as strictement rien à foutre… Comme ça au moins t’es sûre qu’il te fera pas souffrir… Quoi qu’il arrive ça te passera à trente-six mille au-dessus… Non… Qu’est-ce qu’on nous bourre le mou, quand on est jeune, avec toutes ces histoires de Prince Charmant… Et nous, comme des connes, on saute à pieds joints là-dedans… Le Prince Charmant, en réalité, c’est le type qu’a du pognon, qui pense qu’à son boulot et qui te laisse le faire cocu à tour de bras… Tiens, le voilà justement !…




Elle est allée à sa rencontre. Le même type que le dimanche précédent a surgi de l’autre côté et est venu s’asseoir à mes côtés…

- Ils sont toujours ensemble ces deux-là…

- Ca en a tout l’air, oui…

- Ils ont de la chance de pas s’être fait prendre… Parce qu’on peut pas dire qu’ils donnent vraiment dans la discrétion…

- C’est peut-être le meilleur moyen de pas attirer l’attention…

- En somme si personne les dénonce…

- Je vois pas qui irait faire une chose pareille… Et surtout pourquoi…

- J’aimerais bien, moi, que quelqu’un me dénonce… On me punirait comme je le mérite…

- S’il y a que ça pour te faire plaisir je veux bien me dévouer…

- Et si je te prenais au mot ?

- Dis toujours… Qu’est-ce tu fais de si grave ?

- Je vous mate dans les douches…

- Mais c’est dégoûtant !

- Je te le fais pas dire…

- Comment tu t’y prends ?

- Il y a une petite lucarne qui paie pas de mine dans vos douches… T’y as jamais fait attention ?…

- Non…

- Elle donne sur un grenier en principe condamné… Mais si on arrive à s’y introduire discrètement…

- T’y es souvent ?

- Tous les jours… Tu vas le dire ?

- Un peu que je vais le dire !… Et comment !…

Je me suis levée…

- J’y vais même de ce pas…

- C’est sympa… Merci…

- Tu t’appelles comment ?

- Felicien… Felicien Maynard…




Noëlle m’a rattrapée dans l’escalier…

- Je peux te parler deux secondes ?

- J’ai pas bien le temps, là…

- Ce sera pas long… Si on partait ?… Si on partait d’ici toutes les deux ?

- Pour aller où ?… Pour faire quoi ?

- N’importe où… Pour être ensemble que nous deux…

- Ecoute…

Je me suis arrêtée. J’ai posé les main sur ses épaules…

- Ecoute… D’abord je n’ai pas la moindre intention de partir d’ici où je me plais vraiment… Ensuite… ensuite si t’as vraiment envie que ça dure entre nous…

- Mais bien sûr que j’ai envie !… Si tu savais !…

- Alors tu t’y prends très mal… Tu es beaucoup trop possessive… Je ne suis pas à toi… Je ne suis à personne… Je suis à moi…

Elle est tombée en larmes dans mes bras…

- Je ferai ce que tu veux… Tout ce que tu veux…




- Felicien ?!… Ah oui ?!… Ca m’étonne pas, remarque !… Pas du tout… C’est bien le style à ça…

- Qui faut que j’aille voir à ton avis ?… Le directeur ?…

- Oh, non !… On le dérange pas comme ça… Et faut suivre la voie hiérarchique… Toi, tu bouges plus maintenant… C’est à moi, la chef de box, d’aller trouver Tixier… Qui verra avec Ménisson… Qui, lui-même, en parlera au directeur s’il le juge nécessaire… L’affaire suivra son cours… Et on nous convoquera – sûrement toutes les deux ensemble – à un niveau ou à un autre…

jeudi 5 mars 2009

La classe des filles ( 14ème jour )

J’ai vaguement entendu les autres se lever. Je me suis voluptueusement rendormie. On était samedi : je pouvais rester au lit aussi longtemps que je le voulais. Je n’allais pas m’en priver…

Quelqu’un m’a réveillée en s’asseyant sur le bord de mon lit. C’était Pernelle…

- Tu dors ?… Faut que je te demande quelque chose… T’as entendu parler de rien ?

- Au sujet de quoi ?

- De moi… De moi et de Laetitia…

- Non… Il se passe quoi ?

- Il se passe qu’il paraît qu’elle m’a tendu un méga piège… Le truc vraiment diabolique… Que c’est impossible que je saute pas dedans à pieds joints… Sauf si je sais ce que c’est… Tu vois pas ?…

- Absolument pas, non… Mais pourquoi tu me demandes ça à moi ?

- Oh, comme ça !… Parce que depuis le début on s’entend bien toutes les deux… Même si j’ai pas toujours été tendre avec toi… Quand on est chef de box on a des obligations auxquelles on ne peut pas se dérober… Quand bien même on le voudrait… Mais je sais que toi tu n’es pas rancunière… Si tu savais quelque chose tu me le dirais, hein ?…

- Oui, mais je sais rien… Absolument rien…

- De toute façon je me fais plus d’illusions… Je l’aurai jamais la place… C’est une vraie petite garce l’autre… Et je peux te dire qu’elle sait mener sa barque… Mais je peux te dire aussi qu’elle l’emportera pas au paradis… Et que si je l’ai pas la place pour l’année prochaine je te lui réserve un chien de ma chienne qu’elle est pas près de l’oublier… Non, parce que franchement tu la vois, toi, surveiller le dortoir des mecs ?… Elle a pas l’étoffe… Il faut quelqu’un qui ait de la poigne… Quelqu’un qui sache s’imposer… Les mater… On s’y prend pas avec eux comme on s’y prend avec des nanas… Et c’est pas pour me vanter, mais là-dessus, moi, je serais imbattable… Et je t’y prendrais un de ces pieds en plus !… En tout cas si jamais c’est elle qui l’a le poste il est hors de question que je revienne ici l’année prochaine… Pour qu’elle me nargue tout ce qu’elle sait pendant un mois merci bien… De toute façon j’en ai fait le tour de toutes ces histoires d’école… Depuis le temps que ça dure ça me saoule à force… Non… Tu sais ce que j’aimerais maintenant ?… C’est diriger un centre de détention… Avec plein de mecs dedans… Je te leur en ferais baver quelque chose de rare… J’ai plein d’idées en plus !…

- Il y aurait pas de filles ?

- Si !… Deux ou trois… Histoire de les exciter sans qu’ils y aient jamais droit… Elles aussi elles ramasseraient… Et pas qu’un peu… Mais bon… Faut pas rêver… Ca se fera jamais… Il faudrait des locaux et du fric pour les aménager… Et comme je n’ai ni l’un ni l’autre…

Elle s’est levée…

- Faut que j’y aille… Mais je compte sur toi, hein !… Si t’apprends quelque chose…



Noëlle a presque aussitôt surgi …

- Qu’est-ce qu’elle te voulait ?

- Oh, rien… Des trucs sans intérêt…

- Elle est restée longtemps… C’était quoi ?..

- T’occupe !… Des conneries, j’te dis !

Je l’ai fait taire d’un baiser. Je l’ai prise dans mes bras. J’ai voulu la caresser. Elle s’est dérobée…

- Non !… Laisse-moi !…

- Mais pourquoi ?

- Parce que… Je sais pas… Je te sens pas ce matin… Et puis j’en suis pas…



En bas Noémie est venue à ma rencontre…

- Qu’est-ce que tu penses de lui ?

- Qui ça ?…

- Ben Eric…

- Qu’est-ce que tu veux que j’en pense ?… Je le connais à peine…

- Je me demande finalement, tout compte fait, je me demande si je vais pas m’installer avec…

- Je croyais qu’il t’ennuyait à mourir…

- Et c’est rien de le dire… Mais d’un autre côté il est fou amoureux de moi… Il gagne bien sa vie… Il est très occupé avec son boulot… Je pourrai faire ce que je veux sans qu’il y mette le nez… Et je m’en priverai pas… Oui… Je crois bien que je vais me laisser tenter…



C’est Pernelle qui a posé la question…

- Bon… Alors on fait quoi ?… On va en boîte comme la semaine dernière ?…

Elles ont fait la moue…

- Mais qu’est-ce qu’on peut faire d’autre de toute façon ?… Il y a rien n’importe comment ici… Et on va pas se coucher comme les poules…



Elles étaient là, tout au fond, entourées d’une dizaine de garçons et de filles de leur âge qui ne m’ont pas, du moins en apparence, prêté la moindre attention… Cynthia, Trianne et Pernelle ont voulu aller danser…

- Tu viens pas ?…

- Non, non, merci… J’ai pas vraiment envie…



Mina m’a fait signe de venir les rejoindre à leur table…

- C’est elle… C’est celle dont on vous a parlé…

Tous les regards ont convergé vers moi. On m’a examinée avec curiosité. Une attention soutenue. Il y a eu des sourires entendus…

- C’est vrai ce qu’elles nous ont raconté ?

J’ai silencieusement acquiescé…

- Oh, mais elle va vous montrer de toute façon…

Une fille a voulu savoir quand…

- Quand vous voudrez…

Elle a suggéré…

- Tout de suite alors !…

- Eh bien allez !…



Tout le monde s’est levé. J’ai suivi. Jusqu’au fin fond du parking baigné d’une lumière crue. On a fait cercle autour de moi…

- Eh ben alors ?!… Qu’est-ce qu’elle attend?

Adeline s’est impatientée…

- Bon, tu te grouilles ?… On va pas passer la nuit là…

Je me suis décidée d’un coup…

- Oh, la vache !… Cette raclée…

- Ca a pas fait semblant…

Il y en a une qui s’est indignée…

- Se déculotter comme ça devant tout le monde… Faut vraiment pas avoir honte…

- Surtout une vieille en plus !…

- Elle mériterait de s’en prendre une autre, tiens !…

- Et carabinée !…

- On la lui met ?

- Elle en vaut pas la peine… On retourne là-bas plutôt…

Ca s’est éloigné en grands rires offensants… Ca a disparu… Il n’est resté que la musique et la rumeur de la ville là-bas tout au fond… Je me suis réfugiée à l’abri de la haie…



- T’es là ?… Ben qu’est-ce tu fais ?…

J’ai sursauté. Je ne l’avais pas entendue revenir Adeline…

- Ah, je vois !… J’aurais dû m’en douter… Ca t’a mise en appétit tout ça… Oh, mais continue, continue !… Amuse-toi !… Je te laisse…

lundi 2 mars 2009

La classe des filles ( 13ème jour )

- Je suis bien tranquille que vous êtes toutes comme moi… Que vous vous fichez royalement de l’Anglais… Non ?

- Oh si, Madame !…

- Ah, vous voyez !… Et vous avez bien raison : il y a des choses beaucoup plus importantes que l’Anglais dans la vie … Qu’est-ce que t’en penses, toi ?…

Noëlle… Dont elle a soulevé le menton du bout du doigt, qu’elle a obligée à lever la tête vers elle…

- Une si adorable petite frimousse… Perdre son temps à faire de l’Anglais… Mais ce serait du gâchis… Un véritable gâchis… Tu sais que tu lui aurais plu ?… Catherine de Médicis – une femme merveilleuse… la meilleure des reines que nous ayons eues – aurait adoré ton petit côté vierge florentine… Elle n’aurait eu de cesse qu’elle ne t’ait compté au nombre de ses suivantes… Tiens, viens !… Monte sur l’estrade… Qui d’autre ?… Toi !… Comment tu t’appelles ?

- Roxane…

- Tu fleures bon tout à la fois l’innocence et la perversité… Un mélange détonant qui, à n’en pas douter, l’aurait séduite… Va vite rejoindre ta petite camarade… Qui encore ?… Non, mais regardez-moi celle-là qui se dissimule sournoisement derrière le dos de ses condisciples… Fais-toi voir… Mais c’est qu’elle est toute intimidée !… C’est quoi ton nom ?… Plus fort !… J’ai pas entendu… Amélie ?!… Bon… Tu sais, Amélie, que c’est un vrai bonheur de te voir rougir comme ça ?… Que ça te va très très bien… Si, si !… Allez, toi aussi, file là-bas… Bien… Pour le moment ça peut peut-être suffire… Alors qui sait à quelle sorte d’exigences Catherine de Médicis soumettait ses suivantes qu’elle sélectionnait avec soin parmi les plus nobles et les plus belles dames de la cour ?… Non ?… Personne ?… Même pas une petite idée ?… Eh bien, de temps en temps, quand l’envie l’en prenait, elle en choisissait deux ou trois auxquelles elle ordonnait de se déshabiller complètement. Et elles s’exécutaient… Devant les autres… Devant les autres et devant les servantes… Elles s’exécutaient parce que c’était le bon vouloir de la reine et qu’on ne refusait rien alors à la reine qui prenait – ce qu’on peut comprendre – un très vif plaisir à ce spectacle… Un spectacle que vous allez, à votre tour, m’offrir toutes les trois aujourd’hui… Et je vous conseille, dans votre intérêt, de faire preuve de beaucoup de bonne volonté… Sinon… Allez !…



Elles se sont interrogées les unes les autres du regard… Concertées à voix basse…

- Eh bien !… Qu’est-ce que vous attendez ?…

Roxane a haussé les épaules…

- Ce qu’on s’en fout n’importe comment !…

A haute et intelligible voix. Et elle est sortie de sa robe… Avec une lueur de défi dans le regard elle a quitté sa culotte et son soutien-gorge qu’elle a jetés sur le bureau. Après une courte hésitation les deux autres l’ont imitée. Et elles sont restées là toutes les trois, côte à côte, bras ballants, sur l’estrade, à attendre…

- Eh bien voilà !… Voilà !… Non, mais regardez ces petites merveilles !… Un régal !… Un vrai délice !… Non ?… Vous trouvez pas ?

Il y en a quatre ou cinq qui ont vaguement approuvé…

- Fais-toi voir, toi !…

Elle a lentement et silencieusement fait pivoter Noëlle sur elle-même. Quatre fois… S’est longuement absorbée dans sa contemplation…

- Etre aussi bien foutue… C’est inouï… Invraisemblable… On croit rêver… Désormais tu resteras comme ça… A chacun de mes cours c’est comme ça que je te veux… Nue… Du début à la fin… C’est compris ?… C’est bien compris ?

Du menton Noëlle a fait signe que oui. Elle l’a brusquement abandonnée, s’est tournée vers Amélie…

- Et toi !… Oui, toi !… Tu caches bien ton jeu, hein ?!… Quand on a des seins comme ça…

Elle a passé la main dessous, les a enrobés…

- Laisse-toi faire !… Laisse-toi faire, j’ai dit !…

Dessinés. Enveloppés…

- Quand on a des seins comme ça on les met en valeur… On les montre… On ne va pas les dissimuler sous les oripeaux que tu portais tout à l’heure… C’est un crime… Un véritable crime… C’est qui ta chef de box ?

- Laetitia…

- Je verrai ça avec elle… Plus question de te voir engoncée à l’avenir dans ces horreurs…



Brusquement, sans que rien ait pu le laisser prévoir, elle a lancé sur les fesses de Roxane une grande claque qui l’a jetée en bas de l’estrade et lui a fait pousser un petit cri de surprise…

- Tu sais qu’à certaines d’entre elles Catherine de Médicis mettait également de retentissantes fessées ?… De préférence à celles de ces grandes dames qui ne pouvaient s’empêcher d’arborer – le plus souvent bien malgré elles – un petit air d’arrogance ou de suffisance qui l’exaspérait profondément… Comme m’horripile, depuis le début, ton attitude supérieure et méprisante… Mais de ça je t’assure que je vais te guérir… Va te mettre contre le tableau… Là… Le nez bien collé… Et les mains sur la tête…

Elle a tapé en pluie. En grêle. Longtemps…



- J’en sais rien, Basile, si j’irai… Je verrai… On n’y est pas encore à demain…

Le chef-cuistot a brusquement relevé la tête…

- Tu vas pas leur faire faux bond au moins ?… Je peux te dire qu’elles n’apprécieraient pas… Et qu’elles te le feraient payer… Cher… Et elles auraient bien raison… Parce qu’elles y comptent vraiment… C’est important pour elles de pouvoir leur prouver à tous, là-bas, qu’elles ne leur ont pas raconté d’histoires… Question de fierté… Tu peux comprendre ça quand même ?… Oui ?… Eh bien alors ?… Pourquoi il faut absolument que tu fasses tout un tas d’histoires ?… Pour te rendre intéressante, c’est ça ?… Tu crois pas que t’as passé l’âge ?… Et que ce que tu risques surtout, en faisant ta mauvaise tête, c’est de te couvrir de ridicule… C’est mon devoir de t’en empêcher… Dans ton propre intérêt… Alors tu me vas faire le plaisir d’aller là-bas demain soir et de t’y comporter comme on est en droit d’attendre que tu t’y comportes… Est-ce que c’est compris ?…

- Oui…

- Bien… Elles sont dans quel état tes fesses ?… Encore très marquées ?

- Pas mal, oui…

- Fais voir !… Effectivement !… Mais on va quand même – si on peut dire – les rafraîchir un peu… Ca leur fera du bien… Et elles seront ravies les filles : plus ce sera éloquent et plus ça apportera de l’eau à leur moulin… Allez, en position !… Ah ben oui ça fait mal, oui, forcément !… Quand ça tombe sur un terrain déjà travaillé c’est beaucoup plus douloureux… Mais tu vas nous montrer que tu es une grande fille très courageuse, hein ?!…